L'Enfant au Tambour (The Little Drummer Boy)


Le chant de Noël The Little Drummer Boy, qui s’intitulait à l’origine Carol Of The Drum, a été écrit en 1941 par la compositrice américaine Katherine Kennicott Davis (25 juin 1892 - 20 avril 1980).

Qui était Katherine Kennicott Davis ?
Durant toute sa carrière de musicienne et de musicologue, Miss Davis a composé près de 800 œuvres : chansons profanes, opéras, musicals, chants de Noël (This is Noel - 1935, The Unmusical Impresario - 1956, The Drummer - 1966, Children of Bethlehem - 1973, Who is Jesus ? - 1974), cantates sacrées, chorales pour les élèves de son école de musique... Elle a par ailleurs rédigé de nombreux ouvrages éducatifs. A sa mort, elle a légué l’intégralité de son catalogue au Wellesley College d’où elle était sortie diplômée en 1914 et où, après des études musicales supérieures au New England Conservatory of Music, elle exerça jusqu’à sa retraite.
Les paroles américaines de
The Little Drummer Boy

Les paroles de la chanson américaine racontent une histoire, celle d’un jeune et pauvre garçon qui fut invité à la naissance de Jésus par les Rois Mages. Ne pouvant lui apporter de cadeau, il fut autorisé par Marie à offrir au nouveau-né un air de musique joué avec son tambourin. Le garçon conclut son histoire par « j’ai joué du mieux que j’ai pu (…) et il m’a souri ». Qu’importe notre orientation religieuse, cette histoire et cette chanson sont belles, pleines de sens ainsi que d’amour et de respect.

Come they told me, pa rum pum pum pum
A new born King to see, pa rum pum pum pum
Our finest gifts we bring, pa rum pum pum pum
To lay before the King, pa rum pum pum pum,
rum pum pum pum, rum pum pum pum,

So to honor him, pa rum pum pum pum,
When we come.

Little baby, pa rum pum pum pum
I am a poor boy too, pa rum pum pum pum
I have no gift to bring, pa rum pum pum pum
That's fit to give the King, pa rum pum pum pum,
rum pum pum pum, rum pum pum pum,

Shall I play for you, pa rum pum pum pum,
On my drum ?

Mary nodded, pa rum pum pum pum
The ox and lamb kept time, pa rum pum pum pum
I played my drum for him, pa rum pum pum pum
I played my best for him, pa rum pum pum pum,
rum pum pum pum, rum pum pum pum,

Then he smiled at me, pa rum pum pum pum
Me and my drum.


Aux origines de The Little Drummer Boy
De nombreuses spéculations ont été faites quant aux inspirations de la compositrice et il avait été dit que la chanson prenait ses sources dans le chant traditionnel tchèque Hajej, nynjej. Cette théorie semblerait pour le moins farfelue car la chanson en question est en fait une berceuse pour l’enfant Jésus. Aucun rapport ne peut être établi dans les paroles (si ce n’est la présence du Christ) et aucun lien ne peut être fait musicalement parlant entre les deux chansons. Je vous laisse vérifier par vous-mêmes :



Cette théorie a été officiellement réfutée plus tard par Claire Fontijn, directrice du département de musique du Wellesley College :

« Alors qu'elle tentait de faire une sieste, ses pensées ont été un jour obsédées par un air, inspiré par le chant de Noël français Patapan. Son esprit transforma « patapan » par « pa-rum-pum-pum », le rythme de sa nouvelle chanson lui vint alors à l’esprit et The Little Drummer Boy était né. » (1)

De Patapan à Pa-rum-pum-pum
Patapan est le titre anglais d’un chant de Noël bourguignon, Guillô, pran ton tamborin (ou encore en français actuel Guillôt - ou Guillaume - prends ton tambourin), écrite et composée en 1720 par le poète, philologue et auteur de Noëls (cantiques) Bernard de La Monnoye (1641–1728).

Dans Guillô, pran ton tamborin, il est question de la naissance du Christ et de bergers venus jouer de la musique en son honneur, avec comme instruments une simple flûte et un tambourin. Dans les paroles, les sons des instruments sont remplacés par des onomatopées, « turelurelu » pour la flûte et « patapatapan » pour le tambourin. Les liens avec The Little Drummer Boy sembleraient donc évidents, que ce soit sur la forme (sujet et paroles) ou sur le fond (musique et rythmes).

Patapan a connu, et connaît encore aujourd’hui, de nombreuses adaptations dans les pays anglo-saxons où la chanson n’a pas été oubliée… alors qu’en France Guillô, pran ton tamborin aurait tendacnce à se faire plutôt rare et reste méconnu au niveau populaire (on trouve toutefois quelques versions sur des albums de chants de Noël chrétien). La version la plus remarquable est probablement (je parle pour moi) celle de Julie Andrews (il n’y a pas de hasard, on reparlera d’elle plus bas) que je trouve purement exceptionnelle dans l’interprétation et dans l’orchestration.

Voici une version récente en français, par un chœur québécois :



Une version instrumentale à l’orchestration médiévale :



Et la version britannique de Julie Andrews que j’aime énormément :



Enregistrements modernes
de The Little Drummer Boy

La chanson fut enregistrée pour la toute première fois en 1951 chez Decca Records par les Trapp Family Singers, la célèbre famille autrichienne von Trapp dont il est question dans le film La Mélodie du bonheur, tiré de l’autobiographie de Maria von Trapp, réalisé en 1965 par Robert Wise, avec l’immense et délicieuse Julie Andrews.

La chanson fut popularisée sept ans plus tard par la chorale de Harry Simeone et fit par la suite le tour du monde, avec pas moins de 200 traductions !



On ne compte plus aujourd’hui les nombreuses interprétations : Justin Bieber, Susan Boyle, Boney M., Mariah Carey, Johnny Cash, Ray Charles, Perry Como, Harry Connick Jr, Bing Crosby & David Bowie, Neil Diamond, les Jackson Five, Josh Groban, Whitney Houston, Burl Ives, Johnny Mathis, le groupe Pentatonix, Ringo Starr, Frank Sinatra, Lindsey Stirling, The Temptations, Andy Williams, Stevie Wonder… impossible de citer l’intégralité des interprètes tant il y en a !



L'Enfant au Tambour en France
En français, L'Enfant au Tambour connaît trois versions très différentes.

La première adaptation, la plus connue, remonte à 1960, écrite par le romancier, parolier et scénariste Georges Coulonges et interprétée d’abord par le groupe vocal les Barclay, puis par Les Petits Chanteurs à la Croix de Bois et enfin rendue ultrapopulaire, si ce n’est même immortalisée, par Nana Mouskouri en 1965. Jairo et Roch Voisine l’ont également reprise plus tard.



C’est avec la version de Nana Mouskouri que j’ai découvert, très jeune, L'Enfant au Tambour. J’étais vraiment toute gosse et cette chanson ne me faisait ni chaud ni froid. Je trouvais la voix de Nana très plaisante et ça s’arrêtait là, je ne l’ai jamais associée à Noël. Et pour cause… En grandissant, quand j’ai eu l’âge de comprendre les paroles, je l’ai rejetée en bloc et je me suis sincèrement demandé ce qui pouvait se passer dans la tête des grandes personnes pour nous refourguer chaque année à Noël une chanson qui racontait l’histoire d’un enfant dont le père était mort à la guerre et qui se préparait à suivre ses pas afin de le retrouver au paradis. Sérieusement ?! J’étais très en colère et j’ai viscéralement détesté cette fichue chanson. 40 ans plus tard, je la haïs toujours autant.

Ce que cette version française raconte est émouvant, certes, mais n’a absolument aucun lien avec Noël. Je ne remets nullement en cause ses qualités artistiques, je rejette son concept même. Comment, très sincèrement, a-t-on pu passer d’une chanson traitant de naissance, d’amour, de cadeau et de partage à une chanson d’enfant mort à la guerre ? Les grands mystères de l’adaptation...
Le pire étant que la chanson était apprise dans les écoles primaires pour son aspect très ludique, puisqu’elle permettait aux élèves de pouvoir jouer du tambourin. Wouééé !!! On rigolait bien en cours de musique en CE2 !

Tarampapampam rapapampam
Sur la route parapapampam
Petit tambour s'en va parapapampam
Il sent son cœur qui bat parapapampam

Au rythme de ses pas parapapampam
Rapapampam rapapampam
Ô petit enfant parapapampam
Où vas-tu tarampapampam
Rapapampam

Hier mon père parapapampam
A suivi le tambour parapapampam
Le tambour des soldats parapapampam
Alors je vais au ciel parapapampam
Rapapampam rapapampam

Là je veux donner pour son retour
Mon tambour tarampapampam
Rapapampam

Tous les anges parapapampam
Ont pris leur beau tambour parapapampam
Et ont dit à l'enfant parapapampam
Ton père est de retour parapapampam
Rapapampam rapapampam

Et l'enfant s'éveille parapapampam
Sur son tambour


Je pense pouvoir dire sans trop me tromper que Sacha Distel avait le même ressenti que moi concernant L'Enfant au Tambour puisque dès 1967, il nous a proposé une nouvelle version, laïque, à des années lumières du texte de Coulonges, et donc très positive. On y parle nuit de Noël, étoile étincelante, rêve d’enfant… On la trouve sur son album de Noël. Je m’interroge encore sur les raisons qui ont poussé nos maîtres d’école à nous faire apprendre la version de Nana Mouskouri alors qu’ils auraient pu choisir celle de Sacha Distel !



Enfin, en 2020, le groupe chrétien Glorious a écrit une nouvelle version de L'Enfant au Tambour, plus fidèle au texte d’origine :



Je trouve magnifique et même vertigineux le parcours de The Little Drummer Boy inspiré par un cantique bourguignon du 18ème siècle, et qui près de 250 ans plus tard, après un long séjour sur le continent américain, revient en France sous une forme différente pour plus tard donner naissance à encore autre chose, selon l'évolution des moeurs, des mentalités, de notre société. Cela montre à quel point nos coutumes et nos traditions sont des organismes vivants, en mouvement, que rien n'est jamais figé, que tout se transforme et s'adapte... tandis que l'esprit demeure intacte.

J’aime énormément retracer l'histoire des chants de Noël, en quête de leurs origines, voir comment ils ont évolué… cette activité est particulièrement enrichissante, passionnante et enthousiasmante. J’aimerais vous proposer dans le futur plus de textes comme celui-ci.

Si le sujet vous intéresse également, je vous invite à consulter ici-même deux autres articles sur cette thématique :

  • Aux origines du chant Deck the Halls
  • Les 12 Jours de Noël et la célèbre comptine associée
  • Baby it's cold outside VS les Woke

  • Sources :
  • Wikipedia
  • Concord Library
  • Radio Jazz Swiss
  • Hymns and Carols of Christmas
  • Carols

  • (1) traduction personnelle des propos issus de l’interview de Claire Fontijn proposée par Wikipedia


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